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Vue des Coulisses
5 mai 2013

Auteuil, Neuilly, Passy

En tant que musicien, ââârtiste, on est toujours censé être ouvert d'esprit. C'est pourquoi lorsqu'on m'a appelé pour aller jouer à Neuilly, j'ai surmonté mes réticences et j'ai accepté.

Et bien, sache que ce concert restera le pire de ces 4 dernières années.

Oui, car, débarquer en Converses au pays de Sarko n'est pas sans dommages.

Alors, avant de te lancer dans cette grande aventure, laisse-moi te raconter mon expérience.

Il faut que tu saches qu'à Neuilly, les gens ne sont décidément, vraiment pas comme nous.
Les serveurs vouvoient les musiciens et aucun ne se permettra de te taper la bise.
Personne ne boit de la vulgaire bière dans un bar à Neuilly mis à part le pauvre musicien qui a soudainement l'air d'un éléphant dans un magasin de porcelaine.

Ici, c'est cocktails ou rien. A la rigueur, champagne. Oui. Mais point trop n'en faut, c'est tout de même assez cliché !

Même les cigarettes fumées par les clients semblent sortir d'un bureau de tabac auquel nous n'aurions pas accès, nous, simples (et pauvres) mortels.

Le client de Neuilly n'est pas n'importe qui et il entend le faire savoir. Peu importe qu'il y ait un concert et que des musiciens essaient tant bien que mal de se faire entendre afin de distraire l'aimable le chaland. Ici, le client est roi ET bruyant. Très bruyant. Tellement bruyant qu'il se peut que le patron, de guerre lasse, demande finalement aux musiciens de laisser tomber et d'arrêter de jouer. Le client braille, le client applaudit ses copains pendant les morceaux, le client hurle, le client est bourré (MAIS pas comme nous). Le client a décidé qu'il se foutait totalement du reste du monde et qu'il voulait écouter 50 Cents tranquillement (véridique) (paradoxal, non ?).

D'ailleurs, c'est quoi ce morceau qu'il joue ce groupe, là ? "C'est qui Jacques Dutronc ?" Bof, jamais entendu parler qu'il a dit le client de Neuilly. Il veut écouter du rap et se dandiner en se faisant croire qu'il est un gros caïd.
Et draguer les vieilles bourges maquillées comme des carrés d'as clientes apprêtées sans qu'on vienne le déranger avec des chansons que personne ne connait et qui parlent de Cactus et autre fille du Père Noël.

Ici, si ton sac à main coûte moins qu'un Vuiton (minimum !), on te demandera de le planquer. Ici, il faut t'installer en moins de 30 minutes, balances comprises, pour ne pas déranger trop longtemps la clientèle de jeunes cadres dynamiques venus se saouler dès 18h30 en sortant du travail. Ici, tu es à Neuilly et on ne plaisante pas avec ça ! Quand une bande de 150 costumes-3-pièces/bourges-qui-se-la-pètent-en-Prada débarquent pour faire la fête, le monde peut bien s'arrêter de tourner.

Tu te dis sûrement "Oui mais bon, au moins, ça doit être bien payé !". Ce à quoi je te répondrai par un "Hahahaha !".
Non.

Ah, vraiment, quelle aventure ! Je ne voulais pas y croire et pourtant, c'était vrai ! Neuilly donc, une expérience...intéressante ! :D

Mon conseil si tu tentes le coup tout de même : si les clients du bar ne t'écoutent pas, prévois quelques bons standards à reprendre gaiement, comme "Camarade Bourgeois", "J'suis snob" ou encore "L'Internationale" ! Peut-être susciteras-tu quelques regards amusés ou courroucés ! Et une réaction vaut mieux que l'indifférence générale, non ?

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